Overwatch 2
Aujourd’hui, nous allons parler des données ! Les données représentent une ressource précieuse pour le game design. Les données, les retours de la communauté, la recherche utilisateur, les discussions en interne et le simple fait de jouer au jeu : tout ceci a une influence sur nos choix en matière de conception. Les données peuvent nous permettre d’avoir une vision d’ensemble, de faire de gros plans sur de minuscules détails, ou encore de mettre en lumière des tendances générales. Dans cet article, nous allons donc parler de ce que les données de la première bêta d’Overwatch 2 peuvent nous apprendre, et de la façon dont nous nous en servons pour choisir le game design le plus pertinent.
Données et design : les performances des personnages à la loupe
L’équipe de conception voulait surveiller différents éléments au cours de cette première bêta. Nous avons pu voir la communauté jouer Sojourn et explorer les refontes de Sombra, Bastion, Doomfist et Orisa pour la première fois. Nous voulions connaître les performances de ces personnages au cours de la bêta et pouvoir réagir en implantant rapidement des changements si jamais ils manquaient d’efficacité ou, au contraire, se révélaient trop puissants par rapport à leurs adversaires.
Afin d’évaluer ces performances, nous observons tous les rangs compétitifs et les niveaux de jeu, de façon globale et pris séparément, afin de visualiser la façon dont différentes portions de la communauté réagissent à l’état actuel du jeu. Les joueurs et joueuses des rangs les plus élevés poussent le jeu jusqu’à ses limites et découvrent souvent les capacités et stratégies les plus puissantes bien plus rapidement que le reste de la communauté. À l’inverse, les joueurs et joueuses des rangs inférieurs peuvent avoir plus de mal face à certains personnages et styles de jeu, et nous estimons qu’il est essentiel de penser à l’ensemble de la communauté lors de nos décisions en matière de game design. Les analyses en fonction du rang représentent donc un aspect crucial de notre travail, mais dans cet article, nous allons nous baser sur des données se rapportant à tous les niveaux de jeu présents dans la bêta.
L’intérêt quantifié : les mesures permettant d’évaluer la popularité des personnages
La « performance » a de multiples facettes, et différentes mesures nous permettent de l’observer sous tous les angles. La première de ces mesures est le taux d’utilisation, c’est-à-dire le pourcentage de temps passé à jouer un certain personnage par rapport à la durée totale des parties. Par exemple, si une équipe a joué Sojourn cinq minutes au cours d’un match de dix minutes, son taux d’utilisation est de 50 %. Au passage, notons que le taux d’utilisation de Sojourn, très élevé au début de la bêta, a ensuite diminué de façon constante.
Taux d’utilisation quotidien de tous les héros, pour tous les rangs, au fil de la bêta. Sojourn, Ana, Orisa, Sombra, Bastion et Doomfist sont mis en relief.
À son maximum, le taux d’utilisation de Sojourn a quasiment atteint les 80 %, ce qui est énorme pour une héroïne DPS. Ana a conservé un taux d’utilisation très élevé pendant la majeure partie de la bêta, mais c’est aussi le cas dans le jeu actuel. Orisa et Doomfist, deux tanks ayant fait l’objet d’une importante refonte, ont aussi été souvent utilisés tout au long de la bêta.
Le taux d’utilisation est une mesure très utile pour voir le jeu exactement comme il apparaît aux joueurs et joueuses. Sojourn était le personnage le plus joué lors du lancement de la bêta ; à ce stade, il y avait une Sojourn dans les deux équipes en lice pendant plus de la moitié du temps de jeu. Cependant, il faut prendre en compte davantage de contexte lorsque l’on observe le taux d’utilisation. Sojourn a été beaucoup jouée pendant cette bêta, et son taux d’utilisation brut devient plus impressionnant encore si l’on prend en compte le nombre d’autres personnages DPS disponibles dans le jeu.
Afin d’étudier le taux d’utilisation en tenant compte du déséquilibre des rôles, nous avons une autre mesure : le taux d’utilisation pondéré. Le taux d’utilisation pondéré mesure l’utilisation d’un personnage en fonction du nombre d’autres personnages du même rôle. Plus précisément, nous prenons le taux d’utilisation brut de chaque personnage et le divisons par le taux d’équilibre de son rôle, c’est-à-dire le taux d’utilisation auquel tous les héros d’un même rôle sont joués de façon égale. La mesure qui en résulte est donc le rapport entre l’utilisation du personnage et ce taux d’équilibre. Pour en revenir à Sojourn, nous voyons qu’au début de la bêta, son taux d’utilisation pondéré était très nettement supérieur à celui des autres personnages.
Taux d’utilisation pondéré pour tous les rangs, au fil de la bêta. Sojourn, Ana, Orisa, Sombra, Bastion et Doomfist sont mis en relief.
Le taux d’utilisation pondéré nous permet de représenter de façon plus exacte l’intérêt suscité par la nouvelle héroïne ou les refontes (comme celles d’Orisa et Doomfist), par rapport à des personnages comme Ana, une héroïne déjà très populaire. Par exemple, Sojourn a atteint un taux d’utilisation pondéré maximal supérieur à 6, ce qui signifie qu’elle était jouée plus de six fois plus souvent que le taux d’équilibre des DPS. Orisa et Doomfist plafonnaient vers les 40 % de taux d’utilisation brut, mais le taux d’utilisation pondéré nous permet de voir qu’ils étaient aussi attrayants pour les tanks qu’Ana l’était pour les soutiens.
Équilibrage des héros : comment les données et commentaires poussent au changement
Notre équipe avait un objectif simple pour la bêta JcJ : nous voulions que tous nos personnages soient agréables à jouer sans être injustes envers leurs adversaires. Nos analyses des taux d’utilisation montrant que le premier point était en bonne voie, nous nous sommes donc penchés sur l’équilibrage. Déterminer comment équilibrer un personnage, c’est une décision qui doit être bien réfléchie et prendre en compte diverses sources, notamment, mais pas seulement, les données. Par exemple, les commentaires des joueurs et joueuses en soutien quant aux capacités de survie de leur rôle dans cette bêta sont à l’origine d’une grande partie des changements apportés aux soutiens lors de la mise à jour d’équilibrage du 5 mai.
Les commentaires de la communauté représentent souvent l’un des premiers signaux indiquant qu’une modification d’équilibrage est nécessaire, et les données peuvent également avoir une grande influence sur ces décisions. Parmi les différentes façons de mesurer les performances des personnages, on peut étudier les taux de victoire sur carte. Cependant, en raison de la nature même d’Overwatch (c’est-à-dire la possibilité de changer de personnage), les taux de victoire sur carte de base ne représentent pas la performance réelle de tel ou tel personnage. Si vous remportez une carte avec Sojourn, mais en ne l’utilisant que la moitié du temps, faut-il compter cela comme une victoire sur carte complète dans le calcul ? Non !
Ne craignez rien, cet exemple n’est que la première étape de notre méthode de suivi du taux de victoire. Pour obtenir une mesure plus utile, nous envisageons les taux de victoire de façon fragmentée, en étudiant aussi la durée d’utilisation d’un personnage donné sur une carte. Dans l’exemple ci-dessus, disons que la carte a duré dix minutes et que Sojourn a donc été jouée la moitié du temps. Sojourn aurait ainsi gagné une « fraction de victoire » de 0,5. Si son équipe avait perdu cette carte, Sojourn aurait obtenu une « fraction de défaite » de 0,5.
Afin de convertir ces fractions en taux de victoire, nous commençons par additionner toutes les fractions de victoire de Sojourn, sur toutes les cartes jouées. Nous divisions ensuite le total de ses fractions de victoire par le total des fractions de Sojourn (victoire et défaite cumulées). Grâce à cette approche, nous obtenons un taux de victoire bien plus représentatif des performances du personnage, tout en prenant en compte les changements de personnage en cours de carte.
L’un des points faibles de cette mesure, c’est que plus un personnage est utilisé, plus son taux de victoire se rapproche des 50 %. C’est exactement ce qui s’est produit pendant l’alpha, avec une Sojourn à la fois très puissante et très utilisée. Puisque les deux équipes jouaient Sojourn, son taux de victoire habituel ne s’écartait guère des 50 %, malgré les ajustements. Après tout, si les deux équipes qui s’affrontent ont chacune une Sojourn, il faut bien qu’il y en ait une qui gagne et une qui perde.
Nous réglons ce problème en appliquant le même calcul des fractions de victoire aux périodes où une seule des deux équipes jouait le personnage en question, ce que nous appelons une période « sans miroir ». En observant le taux de victoire sans miroir, on peut enfin voir les performances d’une héroïne comme Sojourn (avec plus de 50 % de présence en miroir) lorsqu’il n’y a pas une deuxième Sojourn en face, et ainsi éloigner son taux de victoire des 50 %.
Mais assez d’explications concernant la mesure du taux de victoire. Observons plutôt l’évolution des taux de victoire sans miroir au fil du temps :
Taux de victoire sans miroir pour tous les rangs, au fil de la bêta. Sojourn, Orisa, Sombra, Doomfist, Soldat : 76 et Symmetra sont mis en relief.
Ce graphique montre les taux de victoire sans miroir des personnages tout au long de la bêta, et permet de voir pourquoi les données ne sont qu’un des nombreux facteurs qui pèsent sur les décisions d’équilibrage. Voir Orisa si bas ou Symmetra si haut va peut-être vous étonner. La technique d’analyse qui donne toute leur utilité à ces mesures est en fait une compréhension du contexte global permettant d’obtenir ces données.
Prenons Symmetra, par exemple. Elle affiche constamment l’un des taux de victoire les plus élevés (dans la bêta comme dans le jeu actuel), parce qu’elle est plutôt utilisée dans des situations où elle a plus de chances de gagner, comme la défense du premier point d’une carte. Les joueurs et joueuses qui utilisent Symmetra ont aussi plus tendance à passer très vite à un autre personnage dès que la défaite devient possible, ce qui fait également monter le taux de victoire de l’héroïne.
Si l’on applique la logique inverse à Sojourn et Orisa, on comprend mieux pourquoi leur taux de victoire est étonnamment bas. Tout le monde avait hâte de les jouer pendant cette bêta, mais personne ne connaissait leurs nouvelles capacités, leur style de jeu. De ce fait, elles ont été choisies même dans des situations perdantes où il aurait été plus avantageux de passer à un autre personnage. Après tout, il est difficile d’être aussi efficace après quelques heures à jouer Sojourn que l’adversaire ayant des centaines d’heures de jeu avec son Soldat : 76.
Avec tout ce contexte et ces données, il devient assez complexe de décider sur quels personnages nous concentrer lors des mises à jour d’équilibrage. Les ajustements apportés à Sojourn représentaient un recul mineur par rapport à la série de modifications effectuées lors des tests alpha, alors que son taux de victoire était presque à la même distance de la barre des 50 % qu’aujourd’hui, mais côté positif. Orisa reste telle quelle pour le moment, car il est encore difficile de savoir si elle ne convient pas, ou si c’est la communauté dans son ensemble qui peine à trouver ses marques avec elle. Nous penchons plutôt pour cette dernière option, car apparemment, tout le monde connaît au moins une personne qui a fait des étincelles dans la bêta grâce à Orisa et son nouvel arsenal. Cela dit, nous envisageons tout de même d’apporter de nouveaux changements à Orisa et Doomfist. Soldat : 76 a bénéficié d’une mise à jour grâce à un mélange idéal de données et de commentaires de la communauté, et l’ajustement de la vitesse de déplacement de Sombra visait à prendre en compte la synergie involontaire de ces deux personnages avec la nouvelle capacité passive des DPS. Les autres personnages concernés par la mise à jour d’équilibrage du 5 mai ont fait l’objet d’un processus semblable.
Stimulus et réaction : évaluation des résultats de nos mises à jour
Passons à la partie vraiment amusante. Puisque nous avions des objectifs pour cette bêta, nous voulions à présent analyser les résultats de nos modifications d’équilibrage. Il ne faut pas oublier que les changements de taux de victoire que nous observons ici viennent d’un échantillon limité de joueurs et joueuses participant à la bêta dans un mode non compétitif, mais cela n’empêche pas ces données d’être très utiles pour évaluer rapidement si les modifications d’équilibrage ont eu un impact ou non. Ont-elles suffi à réduire un peu le taux de victoire de Soldat : 76 ? Les changements apportés aux soutiens ont-ils permis d’aider les personnages en difficulté, comme Zenyatta ? Prolongeons notre graphique des taux de victoire de plusieurs jours pour voir. D’abord, les soutiens :
Taux de victoire sans miroir pour tous les rangs, au fil de la bêta. Les soutiens ayant bénéficié de modifications d’équilibrage sont mis en relief.
En règle générale, pour tous les soutiens ayant subi une modification d’équilibrage (dont la correction de bug de Valkyrie pour Ange), le changement de taux de victoire sans miroir a été immédiat, sauf pour Baptiste, dont l’équilibrage a fait l’objet d’une mise à jour ultérieure. Ce qui veut dire que dans l’ensemble, les modifications ont bien eu l’effet escompté ! Toutefois, c’est sur Zenyatta que l’impact a été le plus remarquable, avec une augmentation du taux de victoire d’environ 5 %. Par le passé, nous avons remarqué que les modifications des points de vie des personnages étaient ce qui avait l’effet le plus notable sur le taux de victoire, ce n’était donc pas totalement inattendu. Nous allons observer la nouvelle puissance de Zenyatta (ainsi que ses « Snap Kicks ») avec la plus grande attention. Passons maintenant aux tanks :
SOURCE : COMMUNIQUE DE PRESSE – AGENCE CARTEL