30 ans de manga français
Le nouvel ouvrage 30 ans de mangas français, rédigé par Nathanaël Bentura et publié par Pix’n Love dans la collection « Pop’n Love », revient en profondeur sur trois décennies de création et d’édition du manga français. Avec ses quelque 350 pages, l’ouvrage entend proposer un panorama documenté de cette histoire méconnue — faite autant de tâtonnements que de succès — dans une logique rigoureuse et informative.
L’angle retenu par Bentura est double : d’un côté, retracer l’évolution d’un secteur éditorial propre au marché francophone — depuis les premiers essais jusqu’aux structures professionnelles — et, de l’autre, donner la parole à celles et ceux qui ont façonné ce mouvement. L’ouvrage présente ainsi les témoignages d’éditeurs, d’auteurs et de dessinateurs ayant contribué à structurer cette filière.
Parmi les choix éditoriaux qui caractérisent cet ouvrage, le format imposant — 350 pages annoncées — et l’illustration riche reviennent en bonne place. La couverture est confiée à Guillaume Lapeyre, tandis que la préface est signée par Reno Lemaire, lui-même figure de la « manfra » (le manga français). Ces éléments indiquent un positionnement à la fois documentaire et visuel, visant tant les amateurs que les professionnels de la bande dessinée/manga.
Dans le détail, l’ouvrage se présente comme un « panorama unique » de l’évolution du manga français, évoquant « trois décennies d’effervescence créative, de paris éditoriaux audacieux, et de rencontres entre auteurs, lecteurs et éditeurs ». Il recense également quelque 80 titres emblématiques de ce secteur, offrant ainsi un repère bibliographique et historique utile pour comprendre les dynamiques de création en France.
Dans le contexte du marché éditorial français, ce type de publication arrive à un moment où la culture manga est largement établie. Une étude récente de Arcom souligne que 42 % des Français de plus de 15 ans lisent des mangas ou regardent des animes, et que le manga pèse 11 % du marché de l’édition littéraire en France. L’ouvrage de Bentura s’inscrit ainsi non pas dans une logique de nouveauté commerciale, mais davantage dans une démarche de rétrospective structurelle : comprendre comment un courant « à la française » s’est constitué, quelles institutions l’ont soutenu, et quels ont été les obstacles.
Au fil des pages, on s’attend à retrouver une chronologie marquée : des premières expérimentations à la fin des années 1980-1990, jusqu’à une industrialisation plus affirmée dans les années 2000-2010, avec une professionalisation croissante de la création et de l’édition de « manga made in France ». On y trouvera aussi la mise en lumière des mutations de diffusion — librairies spécialisées, salons, internet — et de lectorat, depuis une niche jusqu’à un public plus large. L’ouvrage insiste sur les témoignages pour restituer de l’intérieur la dynamique éditoriale : quels choix de formats ? quelles influences esthétiques ? quels rapports avec le manga japonais ?
En somme, « 30 ans de mangas français » se présente comme un ouvrage de référence pour qui souhaite comprendre l’essor du manga dans l’Hexagone sous l’angle français — créateurs, éditeurs, lecteurs. Son cadre éditorial, son ampleur et son approche témoignent d’une volonté de poser une historiographie, plutôt que d’offrir un simple panorama superficiel. Il pourra constituer un outil de travail utile pour les professionnels, chercheurs, bibliothécaires ou tout lecteur curieux d’histoire éditoriale francophone dans le domaine du manga.
