TEST – Notre avis sur Caravan SandWitch (PC)

13 Sep 2024 | TESTS / PREVIEWS

Caravan SandWitch

Dans un paysage vidéoludique saturé de productions aux ambitions techniques et narratives toujours plus grandes, Caravan SandWitch parvient à se frayer un chemin en proposant une expérience qui mise sur l’exploration et la tranquillité, loin des batailles acharnées ou des quêtes épiques habituelles. Développé par le studio français Plane Toast et publié par Dear Villagers, ce jeu d’aventure repose sur une simplicité assumée qui cherche à captiver par son ambiance, son atmosphère et son gameplay détendu. Cependant, derrière cette sérénité apparente, se cachent des choix de design parfois discutables et une expérience de jeu qui, bien qu’agréable, laisse un goût d’inachevé. Caravan SandWitch réussit-il à tenir les promesses de son atmosphère si particulière ou tombe-t-il dans la répétitivité d’une formule pourtant attrayante sur le papier ? Voyons cela ensemble.

Le point de départ de Caravan SandWitch est un postulat narratif classique : Sauge, l’héroïne, revient sur sa planète natale Cigalo après avoir reçu un mystérieux signal de détresse de sa sœur Garance, disparue depuis six ans. Cigalo est une planète marquée par les ravages du TARAASK, une tempête apocalyptique déclenchée 40 ans auparavant à la suite de l’exploitation abusive de ses ressources par un consortium. À travers cette quête, Sauge va non seulement tenter de retrouver sa sœur, mais aussi renouer avec les habitants de son village natal, un lieu figé dans le temps.

Le récit, bien que sobre, offre des moments d’émotion sincère grâce aux interactions avec les divers personnages du jeu. Les habitants de Cigalo, qu’ils soient humains, robots ou même les mystérieux Reinetos (une espèce de grenouilles humanoïdes), apportent de la vie à ce monde dévasté. Le jeu explore des thèmes tels que l’importance de la communauté, la survie dans l’adversité, et les conséquences d’une exploitation excessive des ressources naturelles. Chaque personnage rencontré a une histoire à raconter, renforçant l’idée que la solidarité est la clé pour reconstruire un avenir meilleur. C’est une approche rafraîchissante du genre post-apocalyptique, habituellement dominé par des récits de survie brutaux.

Cependant, si l’atmosphère narrative est engageante, on regrette parfois une certaine superficialité dans le développement de l’histoire principale. Les mystères entourant le TARAASK et la disparition de Garance sont certes intéressants, mais ils manquent d’impact émotionnel et de moments forts pour véritablement captiver le joueur. La conclusion de l’intrigue, bien que proposant deux fins alternatives, semble trop abrupte et laisse une impression de précipitation après une montée en puissance trop timide.

Au cœur de Caravan SandWitch se trouve une boucle de gameplay reposant sur l’exploration. Cigalo est un monde semi-ouvert que le joueur parcourt principalement à bord d’un van, élément central du jeu. Ce véhicule devient un véritable compagnon de route, se voyant régulièrement amélioré pour permettre à Sauge d’accéder à de nouvelles zones du monde. Que ce soit avec un grappin pour franchir des gouffres ou une antenne pour repérer des objets cachés, chaque nouvel outil débloque de nouvelles possibilités d’exploration.

Cette mécanique d’amélioration du van s’inscrit dans une approche de type Metroidvania, où les joueurs doivent retourner dans des zones déjà visitées pour accéder à des endroits auparavant inaccessibles. Si cela ajoute un sentiment de progression satisfaisant, le jeu tombe rapidement dans une certaine répétitivité. En effet, la collecte de composants nécessaires pour améliorer le van devient une tâche fastidieuse, d’autant plus que ces objets, répartis en différentes raretés, sont souvent difficiles à localiser. Le retour constant dans des environnements déjà explorés, sans réelle variété dans les objectifs, peut finir par lasser les joueurs, notamment dans les dernières étapes du jeu où les exigences en composants deviennent plus élevées.

De plus, bien que l’exploration soit agréable grâce à des commandes de van fluides et une carte qui reste à une échelle gérable, le manque de diversité dans les environnements se fait sentir. Cigalo se divise principalement entre déserts, ruines, et quelques rares zones verdoyantes, ce qui, malgré la beauté de ces lieux, finit par rendre le monde trop homogène. Les puzzles environnementaux disséminés dans le jeu, bien que sympathiques, manquent de complexité pour réellement stimuler les joueurs habitués aux défis plus élaborés.

Graphiquement, Caravan SandWitch est une réussite. Le jeu adopte un style cel-shading qui sied parfaitement à l’atmosphère méditerranéenne du monde de Cigalo, rappelant les villages provençaux ensoleillés et les vastes étendues désertiques. Chaque environnement est conçu avec soin et regorge de petits détails qui donnent une véritable identité au monde. Le contraste entre la beauté naturelle des paysages et la désolation causée par la tempête apocalyptique est frappant et participe à l’immersion. Cependant, si l’ambiance visuelle est captivante, des problèmes techniques viennent régulièrement entacher l’expérience. Des pop-ins de textures, des bugs de caméra et des ralentissements occasionnels nuisent à la fluidité du jeu. Ces failles techniques, bien que non rédhibitoires, interrompent l’immersion et donnent parfois l’impression que le jeu manque de finition.

Sur le plan sonore, la bande-son de Caravan SandWitch est également un point fort. Les musiques, discrètes mais efficaces, soutiennent parfaitement l’atmosphère détendue du jeu. La chanson d’introduction, en particulier, composée par Antynomy, se distingue par sa beauté et contribue à donner une identité musicale au jeu. Cependant, la bande-son devient parfois trop discrète, et on aurait apprécié davantage de morceaux marquants pour accompagner les moments clés du jeu.

Un des points les plus louables de Caravan SandWitch réside dans son engagement pour la diversité et l’inclusivité. Le jeu intègre des personnages LGBTQ+ de manière naturelle, sans en faire un élément central de la narration, ce qui reflète une démarche inclusive tout en subtilité. Sauge a par exemple deux pères, et plusieurs personnages utilisent des pronoms neutres. Cette représentation est une bouffée d’air frais dans un milieu vidéoludique encore souvent conservateur en matière de diversité. En matière d’accessibilité, Caravan SandWitch fait également preuve d’attention. Le jeu propose diverses options pour adapter la caméra et les contrôles, permettant ainsi aux joueurs souffrant de cinétose ou de problèmes de maniabilité de profiter du jeu dans de bonnes conditions.

Avec une durée de jeu oscillant entre six et dix heures, Caravan SandWitch ne prétend pas offrir une aventure titanesque, et c’est peut-être là que réside l’un de ses plus grands atouts. Le jeu sait ne pas s’éterniser, évitant ainsi de devenir trop répétitif, bien que cela puisse malgré tout arriver dans les derniers chapitres. Le format court permet d’apprécier l’expérience sans qu’elle ne devienne pesante, et les joueurs qui prendront le temps d’explorer les moindres recoins du monde pourront profiter de quêtes secondaires qui, bien que parfois anecdotiques, apportent un contexte supplémentaire à l’histoire et aux personnages. Cependant, malgré ses deux fins alternatives, la rejouabilité reste limitée. Le manque de variété dans les objectifs et la répétitivité des tâches risquent de décourager les joueurs de relancer l’aventure pour découvrir l’autre fin.

En définitive, Caravan SandWitch est un jeu qui séduit avant tout par son atmosphère unique et son approche non violente de l’aventure. Son monde semi-ouvert, bien qu’un peu répétitif, offre une exploration agréable, et les thèmes abordés autour de la communauté, de la survie et de l’impact environnemental lui confèrent une profondeur narrative intéressante. Cependant, le jeu souffre de sa répétitivité, de certains problèmes techniques et d’une histoire qui, malgré de bonnes idées, ne parvient pas à pleinement captiver.

Ce titre indépendant, sans être révolutionnaire, propose néanmoins une expérience différente, loin des productions plus ambitieuses et souvent plus complexes. Les amateurs d’exploration tranquille et de récits touchants y trouveront probablement leur compte, tandis que ceux à la recherche d’un gameplay plus varié risquent de rester sur leur faim. Caravan SandWitch reste ainsi une œuvre imparfaite, mais sincère, qui mérite d’être découverte, ne serait-ce que pour ses moments de poésie simple et sa douceur mélancolique. Un jeu à savourer pour ce qu’il est, sans en attendre plus que ce qu’il propose.

 

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