TEST – Notre avis sur Sid Meier’s Civilization VII (PC)

27 Fév 2025 | TESTS / PREVIEWS, TESTS / PREVIEWS - MIS EN AVANT

Civilization VII

Dans le grand livre du jeu de stratégie, rares sont les sagas à avoir marqué leur époque comme Civilization. Depuis plus de trois décennies, la série de Sid Meier a façonné l’histoire du genre 4X, traçant la ligne entre tradition et innovation. Avec l’arrivée de Sid Meier’s Civilization VII, Firaxis promet un tournant audacieux : refondre les mécaniques tout en restant fidèle à l’ADN de la franchise. Mais le pari est-il réussi ? Cette nouvelle itération parvient-elle à renouveler l’expérience sans trahir l’essence du jeu ? Il est temps de fonder une nouvelle civilisation et de voir si l’Histoire retiendra son nom.

Dès les premiers tours, un sentiment nouveau émerge : le monde ne se contente plus d’exister, il évolue, il respire, il s’adapte. Civilization VII introduit une refonte majeure de la structure du jeu en divisant l’histoire en trois grandes ères : l’Antiquité, l’Exploration et la Modernité. Là où les précédents opus tendaient à s’essouffler en milieu de partie, cette segmentation insuffle une dynamique nouvelle. Chaque période apporte son lot de bouleversements : nouveaux défis, réorientations stratégiques, remaniements culturels. Plus question de dérouler une stratégie unique du début à la fin, il faut constamment s’adapter, redéfinir ses ambitions et parfois accepter de tout reconstruire.

Mais cette évolution ne s’arrête pas là. Chaque ère impose des choix qui façonnent l’identité de votre empire, un élément qui fait écho à la mécanique introduite par Humankind, mais avec une exécution plus fluide. Si la possibilité de changer de civilisation en cours de partie intrigue, elle peut aussi frustrer : il est parfois difficile de se projeter sur le long terme quand chaque ère redistribue les cartes. Là où Civilization VII frappe fort, c’est dans l’affinement des mécaniques centrales. Les quatre piliers du 4X – exploration, expansion, exploitation et extermination – sont toujours au cœur du jeu, mais Firaxis a su les enrichir avec de nouvelles strates stratégiques.

L’un des changements majeurs réside dans le système de commandants. Là où les précédents opus obligeaient à jongler entre de multiples unités militaires dispersées sur la carte, ce nouvel opus regroupe plusieurs unités sous un même leader, rationalisant la gestion des troupes tout en ajoutant une nouvelle profondeur tactique. Les batailles deviennent moins chaotiques, plus lisibles, sans pour autant sacrifier la complexité du combat.

Mais c’est du côté de la diplomatie que l’évolution est la plus marquante. Fini les interactions rigides et souvent prévisibles des anciens volets. Ici, les alliances sont volatiles, les engagements ne sont jamais définitifs, et la politique mondiale devient un véritable terrain de jeu. Soutenir discrètement un allié en guerre, manœuvrer pour renverser une coalition adverse ou manipuler les cités-états en votre faveur : autant de stratégies qui confèrent une saveur nouvelle aux relations internationales. Pour la première fois, la diplomatie ne se résume plus à un simple échange de ressources ou à des promesses rarement tenues : elle devient un levier puissant, une arme à double tranchant dont les effets se font sentir sur le long terme.

Sur le plan technique, Civilization VII fait honneur à son héritage tout en modernisant sa présentation. Les environnements sont plus détaillés, les animations plus fluides, et chaque civilisation affiche une identité visuelle marquée qui se reflète jusque dans l’architecture de ses villes. Firaxis a visiblement mis un point d’honneur à rendre chaque partie unique, non seulement dans le gameplay, mais aussi dans l’esthétique de chaque empire. La bande-son, comme toujours, est un chef-d’œuvre. Chaque civilisation dispose de thèmes musicaux évolutifs, s’adaptant à la progression de votre empire à travers les âges. Les compositions épiques viennent sublimer l’aventure, renforçant l’immersion et l’émotion des grandes victoires comme des défaites cuisantes.

Cependant, tout n’est pas parfait. Si l’interface utilisateur a été améliorée pour offrir une navigation plus intuitive, certaines icônes et notifications restent confuses, surtout lors des phases avancées de la partie. Firaxis a certes simplifié la gestion de certains aspects, mais il reste des ajustements à faire pour que l’expérience soit aussi fluide qu’elle le pourrait. Les ambitions de Civilization VII sont indéniables, mais certaines de ses innovations divisent. Le système de changement de civilisation à chaque ère, bien qu’intéressant sur le papier, peut donner un sentiment de détachement vis-à-vis de son empire. Il est difficile de bâtir une identité forte lorsque l’on sait que tout peut basculer en quelques tours.

De même, le système de crises, qui introduit des événements narratifs à gérer, manque parfois de profondeur. Si certaines situations parviennent à captiver, d’autres donnent une impression d’arbitraire, brisant l’immersion par des conséquences peu crédibles. Ces mécaniques restent perfectibles, mais elles témoignent d’une volonté d’introduire plus de narration et de dramaturgie dans le jeu, ce qui est une direction prometteuse pour l’avenir de la série. Enfin, l’intelligence artificielle souffre toujours de certaines failles. Si les dirigeants adverses sont plus réactifs et adaptatifs qu’auparavant, il arrive encore que certaines décisions de l’IA paraissent incohérentes, rendant certaines parties trop faciles ou, à l’inverse, inutilement punitives.

Avec Civilization VII, Firaxis ne s’est pas contenté d’appliquer une simple couche de vernis à une formule éprouvée. Le studio a pris des risques, cherché à renouveler son modèle, quitte à parfois bousculer les habitudes des vétérans de la série. Et si toutes les innovations ne sont pas parfaites, elles apportent un vent de fraîcheur qui redonne à la saga une ambition nouvelle.

Malgré quelques défauts d’équilibrage et certaines mécaniques encore perfectibles, Sid Meier’s Civilization VII parvient à capturer l’essence de la série tout en osant explorer de nouvelles pistes. Ce n’est pas une révolution totale, mais une évolution audacieuse qui confirme une chose : Civilization est loin d’avoir dit son dernier mot. Les empires s’effondrent, les civilisations se succèdent, mais une seule constante demeure : encore une fois, on se surprend à lancer un tour de plus… puis un autre… et encore un autre.