Absolum
Je me souviens encore du moment où Absolum a été dévoilé, en mars 2025. Quelques secondes de vidéo, des coups nets, des lignes dessinées à la main, une fluidité rare. Tout de suite, le mélange m’a frappé : Dotemu, Guard Crush Games et Supamonks semblaient vouloir faire converger deux savoir-faire, celui du combat 2D pur et celui de l’animation expressive. Depuis cette annonce, j’ai suivi chaque image, chaque extrait. Et le 9 octobre 2025, quand le jeu est enfin arrivé, j’ai trouvé un titre qui assume ce qu’il promettait : un beat’em up exigeant, précis, mais enrichi par une boucle roguelite pensée pour la rejouabilité. Pas un patchwork de tendances, mais une vraie tentative de moderniser un genre qui vivait encore trop souvent dans la nostalgie.
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Le premier contact reste visuel, et pour de bonnes raisons. L’univers de Absolum est lisible, coloré, expressif sans être saturé. Les personnages ont une clarté de silhouette qu’on voit rarement : la grande épée de Galandra, la carrure trapue de Karl, la posture tendue de Cider ou la légèreté de Brome, le mage amphibien. Chaque mouvement est compréhensible, et pas seulement joli : les animations traduisent le rythme du combat, anticipent l’impact, rendent chaque échange crédible. On sent la main de Supamonks, studio d’animation habitué aux productions haut de gamme, qui a mis son savoir-faire au service du gameplay plutôt qu’au-dessus de lui. Le résultat est un jeu qui se lit aussi bien qu’il se regarde : les coups sont distincts, les priorités visuelles respectées, et même en plein chaos, on comprend ce qui se passe. C’est un point souvent négligé dans les beat’em up ; ici, c’est un pilier.
Mais la beauté n’aurait aucun intérêt si le système n’était pas solide. Guard Crush Games, déjà responsable du retour réussi de Streets of Rage 4, a bâti un moteur de combat remarquable. Le ressenti des coups, la précision des enchaînements et la cohérence de la défense donnent au jeu un équilibre rare. Les attaques lourdes ont du poids, les coups légers permettent d’ouvrir les gardes, et la parade devient une mécanique essentielle. C’est une vraie défense active, pas un simple bouclier : on attend le bon moment, on renvoie la pression, et on reprend l’avantage. L’esquive, placée sur une diagonale plutôt que sur une touche “magique”, demande d’anticiper l’espace et de comprendre la profondeur du plan. Les prises, les lancers et les contre-attaques complètent un ensemble fluide, rythmé, mais jamais brouillon. Le jeu récompense la justesse, pas la frénésie. Quand on se trompe, on sait pourquoi.
Là où Absolum se distingue, c’est dans la manière dont il combine ce socle classique avec une structure de roguelite. Chaque partie est une traversée d’un monde fracturé, à reconstruire petit à petit. Le joueur choisit ses itinéraires, découvre des embranchements, des rencontres et des événements qui modifient la suite du parcours. Ces variations ne sont pas seulement décoratives : elles influencent réellement les combats et la manière d’aborder les zones suivantes. Deux systèmes de progression cohabitent : les Rituels, qui apportent des bonus passifs (vitesse, résistance, effets de magie), et les Arcanes, des capacités spéciales qui changent profondément la façon de jouer. Cette couche supplémentaire transforme le combat sans le trahir. On adapte sa stratégie, on découvre des synergies inattendues, et chaque run devient un apprentissage. Tout n’est pas parfait : certains rituels paraissent anecdotiques ou trop faibles, mais la variété générale maintient l’intérêt.
La construction des niveaux suit une logique claire : des zones courtes, bien délimitées, avec des thèmes visuels et mécaniques précis. On passe d’une forêt brumeuse à un village minéral, d’un sanctuaire magique à des arènes fermées où la mobilité devient un enjeu. Chaque environnement propose un type de pression différent : contrôle de foule, mobilité, lecture des signaux. Les ennemis ne sont pas de simples sacs à points de vie ; ils forcent à prioriser, à isoler, à interrompre. On apprend à reconnaître les signaux d’attaque, à écouter les sons qui annoncent un danger. C’est un apprentissage honnête, progressif, rarement frustrant. Le jeu évite les tricheries. Seules les dernières zones pêchent par excès : trop d’adversaires à l’écran, un rythme plus lourd, et un final un peu trop condensé qui laisse une impression de précipitation. Rien de rédhibitoire, mais on sent qu’une demi-heure de plus, mieux étalée, aurait permis à l’ensemble de respirer davantage.
Les quatre personnages principaux ne sont pas des variations décoratives. Chacun impose sa propre lecture du système. Galandra, la guerrière, base son efficacité sur la portée et le timing. Elle domine les couloirs, mais souffre si on la presse. Karl, le nain bagarreur, compense sa lenteur par des attaques explosives et des armes à feu bien intégrées. Cider, le duelliste, est un pur plaisir de mobilité et de précision : il transforme les combats en duel, même quand ils sont à six contre un. Brome, enfin, bouscule tout : son style flottant, sa capacité à se repositionner et à contrôler la foule lui donnent un aspect presque puzzle. On ne joue pas “à Absolum”, on joue “son” Absolum. Et c’est ce qui rend les retours de run si plaisants. On ne refait pas le même parcours, on le relit sous un autre angle.
Cette approche très personnelle du gameplay prend encore une autre dimension dès qu’on introduit un deuxième joueur. La coopération, qu’elle soit locale ou en ligne, ne se contente pas d’ajouter de la puissance : elle modifie la manière même d’aborder le combat. Les ouvertures deviennent partagées, les réflexes se synchronisent, et les erreurs se rattrapent dans une dynamique de confiance. Un joueur bloque, l’autre intercepte ; une parade bien placée libère un espace qu’un partenaire exploite immédiatement. À deux, le jeu devient une sorte de conversation gestuelle, fluide et naturelle. En ligne, la stabilité reste correcte : la latence est bien gérée, même si quelques microcoupures peuvent briser l’élan. Le choix de limiter la coop à deux joueurs reste logique : l’écran garde sa lisibilité, le tempo reste clair, et chacun conserve sa responsabilité dans l’action. Un mode à quatre aurait sûrement déformé ce fragile équilibre.
Côté univers, Absolum ne cherche pas à rivaliser avec les RPG bavards. Le monde de Talamh, dominé par le Roi-Soleil Azra et son Ordre Cramoisi, tient davantage du décor symbolique que du récit traditionnel. On en découvre les fragments par touches : dialogues courts, descriptions, visions. Cela suffit à créer un cadre solide. L’enjeu est clair : libérer une magie confisquée, rétablir un équilibre brisé. Le jeu ne s’attarde pas sur des cinématiques inutiles ; il préfère laisser le décor, les ennemis et les boss raconter la tragédie. On ne s’y attache pas pour le scénario, mais on y croit grâce à la cohérence visuelle et sonore. Par moments, l’atmosphère évoque plus la fable que l’épopée, et cela fonctionne parfaitement.
La bande-son mérite ici une mention particulière, car elle lie tous ces éléments artistiques en un ensemble cohérent. Les compositions soutiennent l’action sans l’étouffer, s’accordant au ton général : énergie, tension, mais aussi respirations bienvenues entre deux affrontements. On retrouve des thèmes récurrents, des variations mélodiques qui renforcent la progression et l’identité des lieux. Les percussions et les cordes ponctuent les moments de bascule, tandis que les nappes électroniques ou les chœurs éthérés donnent une texture au monde. Les effets sonores, eux, sont d’une précision exemplaire : une parade sonne sèche, un impact lourd résonne juste ce qu’il faut, et chaque Arcane trouve sa couleur sonore. C’est un design audio pensé, mesuré, et surtout lisible — ce qui, dans un jeu d’action, vaut de l’or.
La difficulté est bien dosée. Absolum demande de la rigueur, mais n’écrase jamais. Les options d’accessibilité permettent de moduler les dégâts infligés ou reçus, d’ajuster la vitesse du jeu, voire de simplifier la survie sans trahir la nature du combat. C’est une vraie leçon d’équilibre : offrir de la marge sans sacrifier le cœur du gameplay. On peut progresser à son rythme, mais on sent toujours la progression du joueur, pas seulement celle des chiffres. La rejouabilité repose sur cette courbe : apprendre, s’améliorer, comprendre. C’est un cycle qui fonctionne.
Techniquement, le jeu est propre. Sur PC comme sur consoles, la fluidité est constante. Les animations conservent leur précision même dans les moments de surcharge, et le framerate ne bronche pas. Le moteur est solide, la réactivité impeccable, la latence faible. Les rares défauts se situent ailleurs : quelques lisibilités ponctuelles, un décor trop chargé ou une caméra qui hésite lors de certains combats verticaux. Rien qui ne casse le rythme, mais des points à peaufiner pour un futur patch.
En termes de contenu, le rapport qualité-prix est excellent. Pour environ vingt-cinq euros, on a un jeu qui offre des dizaines d’heures de jeu sans jamais reposer sur du remplissage. La structure en runs encourage la découverte. On revient pour explorer une autre branche, tester une nouvelle combinaison d’Arcanes, ou tout simplement pour le plaisir de maîtriser un personnage. La satisfaction ne vient pas de la récompense accumulée, mais de la progression personnelle. Chaque défaite enseigne quelque chose. Chaque réussite donne envie de recommencer, pour voir jusqu’où le système peut aller.
Au moment de dresser un bilan, je n’ai pas envie de parler de “chef-d’œuvre” ni de “révolution”, mais d’un aboutissement cohérent. Absolum ne triche pas : il sait ce qu’il veut être, et il l’est. C’est un beat’em up moderne, nourri par des décennies d’expérience, mais qui regarde vers l’avant. Son hybridation avec le roguelite ne sert pas de prétexte, elle renforce le cœur du jeu. On y retrouve le plaisir brut du contact, la tension d’un duel, l’excitation d’un run qui bascule. Et tout cela se fait sans lourdeur, sans cynisme, avec une sincérité que l’on ressent à chaque coup.
Certes, j’aurais aimé que l’acte final prenne un peu plus le temps de conclure, que certains rituels gagnent en personnalité, ou que la lisibilité soit encore meilleure dans deux ou trois zones. Mais ces remarques tiennent plus du perfectionnisme que de la critique. Ce que le jeu accomplit est déjà remarquable : il redonne envie de rejouer, de comprendre, d’apprendre. Il nous rappelle que le beat’em up n’est pas un genre figé, mais une manière de penser le combat, de composer avec le risque et la maîtrise. En refermant Absolum, on ne se dit pas qu’on a terminé un jeu, mais qu’on a dompté une mécanique qui ne demande qu’à être rejouée. Et c’est souvent le signe qu’un grand jeu d’action vient de naître.